trimard

Le mot trimard est un mot d’argot ancien. Au départ, il désigne une route, un chemin. Mais de nos jours, trimard est une insulte adressée à quelqu’un qu’on juge idiot. C’est devenu un synonyme de imbécile. Voici l’histoire.

Dès le XVI^e siècle, trimard s’utilise en argot avec le premier sens que j’ai indiqué. Une expression comme prendre le trimard voulait dire « arpenter les routes, en travaillant quand l’occasion se présente ».

De là, le mot trimard a désigné le mode de vie des personnes qui parcouraient la campagne, qui allaient de ville en ville. Ce mot résume l’existence de vagabonds d’abord appelés trimardeurs, plus tard trimards. (Aux siècles précédents, trimard a aussi désigné un voleur qui dépouillait ses victimes sur les routes.)

Dans les années 1960, il y avait encore beaucoup de trimards en France, qui faisaient par exemple les travaux saisonniers. C’est aussi l’époque d’une vague d’arrivée de Gitans. Eux aussi se déplaçaient constamment, mais en famille, et avec leur logement.

Les Gitans et les trimards se sont alors retrouvés en concurrence pour les travaux des champs. Pour les fermiers qui les embauchaient, les Gitans présentaient l’avantage d’avoir déjà de quoi se loger.

La cohabitation entre Gitans et trimards a conduit à des situations où des familles de Gitans hébergeaient un trimard. Celui-ci réalisait des tâches domestiques pour la famille et il était éventuellement logé avec les animaux. On pouvait dire de telle personne « c’est le trimard de [nom d’une famille de Gitans] ».

Le mot trimard s’est donc implanté dans le langage des Gitans, pour désigner une personne jugée inférieure. Son passage dans l’argot commun s’est déroulé à Montreuil dans le dernier tiers du XX^e siècle, comme c’est le cas pour beaucoup de mots d’argot ayant d’abord circulé dans cette communauté (kichta, rodave, pénave, poucave, etc.).